Georges Simenon, romancier de l’instinct
Pierre Debray Ritzen
Au XVIIIe siècle, l’autopsie des grands était la règle. Leur stature historique en faisait obligation. Est-ce que, de nos jours, le génie romanesque n’implique pas l’ouverture totale sinon du corps de l’auteur du moins de sa vie et de son âme?
Ce livre est le produit d’un demi-siècle de réflexions (l’auteur avait moins de 15 ans quand il a lu Le Chien Jaune). La pratique de la neuro-psychologie (cherchant les rapports de l’instinct et de l’intelligence); maintes rencontres avec Simenon depuis 1960, autorisent Pierre Debray-Ritzen à
reprendre l’étonnant mélange de cet être, maigre de connaissances, surprenant d’intuition, formidable dans son métier jaillissant,
Georges Simenon est curieusement un écrivain à deux niveaux: d’une part un moraliste et commentateur de l’actualité discutable et d’autre part un romancier d’envergure, à l’échelle des plus grands, qui nous a donné l’image d’un certain type humain que nous portons tous en nous:
l’homme nu, raboté, mû par des impulsions viscérales… l’homme devenu à la longue «tel qu’en lui-même la non-éternité le change».
Dans «Quand j’étais vieux», Simenon a écrit au sujet de Pierre Debray-Ritzen:« Attends le docteur R… qui est pressé de voir publié le livre qu’il a écrit sur moi et qui est persuadé aussi d’avoir découvert des choses subtiles ou secrètes. Il ne se doute pas et je ne lui dirai pas pour ne pas le peiner – que j’ai l’impression que tout ce qu’il a écrit me diminue. Il faut que j’évite que D., moins patiente que moi surtout en ce qui me concerne, ne lui dise trop durement ce qu’elle pense. C’est d’autant plus difficile que je l’aime beaucoup et que j’admire son talent.
Ne suis-je pas un peu comme Anatole France prenant ombrage de son portrait par Van Dongen? Or Van Dongen avait raison.»
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Depuis plus de trente ans Pierre Debray-Ritzen, professeur à la Faculté de Médecine de Paris, psycho-pédiatre, a poursuivi conjointement ses activités de médecin et d’écrivain.