La part de l’ombre

Monique Schneider

Approche d’un trauma féminin

Quelles modifications l’approche du trauma fait-elle subir au cadre analytique? Dans le parcours clinique suivi ici, celui de Claire, l’affleurement du trauma infantile provoque une réaction double à la fois extrême acuité de la production onirique, reconduisant à l’abrupt du trauma, et retrait, incrédulité : “je n’y étais qu’à moitié”. Place désertée qui va être dès lors investie par l’analyste,
sommé d’incarner, non plus le sujet-supposé-savoir, mais le sujet-supposé-y-croire, en une adhésion hallucinée : “Vous, vous le voyez partout”.

Voir: tâche qui focalise d’autant plus la passion de Claire que les moments traumatiques viennent inciser la maîtrise visuelle, pour imposer le rapport à un espace corporel rencontré dans le noir : chevelure, toison, lieu féminin, éléments situés dans un “hors-scène”. Zone d’ombre qui renvoie aussi bien à un espace politique placé sous le signe de la menace d’arrestation et de la clandestinité.

Monique Schneider, philosophe et psychanalyste, travaille sur ce qui, lors de la fondation de la psychanalyse, se trouve à la fois bâillonné et agissant : le trauma d’enfance, la séduction, le rapport
au féminin appréhendé comme lieu originaire. Elle a notamment publié De l’exorcisme à la psychanalyse. Le Féminin expurgé (Retz, 1979), Freud et le plaisir (Denoël, 1980), La Parole et
l’inceste (Aubier-Montaigne, 1980), Père ne vois-tu pas…? (Denoël, 1985) et Le Trauma et la filiation paradoxale: de Freud à Ferenczi (Ramsay, 1988).