La France s’est bâtie comme un château fort national au milieu d’une terre d’Empires. De Richelieu à de Gaulle, les murailles de l’État ont protégé la nation et lui ont assuré prospérité et grandeur. Mais tiendront-elles encore longtemps?
La nation française arrive au terme de sa grande aventure. Sa puissance coloniale n’est plus qu’un souvenir et la résurgence de la question allemande met en péril sa fragile primauté politique en Europe occidentale. L’internationalisation des processus économiques et la confusion des doctrines de dissuasion nucléaire dépossèdent l’État français de ses principaux leviers de pouvoir. Le renouveau de l’esprit religieux, l’audace d’un Jean-Paul II menacent directement le consensus intérieur où s’enracine la vieille complicité de la nation avec ses institutions étatiques, fondement même de l’identité française.
François Mitterrand a hérité d’un État qui n’a plus la force de ses ambitions. Toutefois, si la France ne peut plus dicter sa loi au monde, n’est-elle pas encore assez forte pour déstabiliser les statu quo? Un rôle peut-être plus conforme au panache national que celui du vieux conservateur fatigué, défenseur des grands « équilibres » du passé.
Qu’on le veuille ou non, voici venu le temps des métamorphoses.
Carlos de Sá Rêgo, historien et économiste de formation, est journaliste à Libération, spécialiste des rapports Est-Ouest et des questions européennes.